On a appel� "baroqueux" les tenants du renouveau de la musique baroque qui a pris son envol vers les ann�es 60. Avec eux s'est amorc� tout un mouvement de red�couverte de la musique ancienne, et un d�sir de conna�tre et de comprendre cette p�riode extr�mement riche.

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L'interpr�tation sur instruments d'�poque est l'une des principales caract�ristiques de cette philosophie, afin de rendre la musique baroque dans toute splendeur avec les instruments pour laquelle elle a �t� con�ue. S'il est clair pour tous qu'un clavecin est fort diff�rent d'un piano, il en va de m�me pour le violon baroque et le violon moderne: le premier est dot� de cordes de boyau, et non de m�tal, ce qui rend un son plus chaud, plus rond, et plus organique. Le traverso diff�re de la fl�te traversi�re, puisqu'il est fait de bois et non de m�tal, et que les trous sont bouch�s avec les doigts; la sonorit� est plus douce, plus suave et moins per�ante. Les cuivres n'�tant pas encore dot�s d'un syst�me de pistons, leur jeu repose sur la gamme des harmoniques, ce qui rend certaines notes plus in�gales que d'autres. Les compositeurs connaissaient ces caract�ristiques, et lorsqu'on entend un orchestre jouer une �uvre baroque sur instruments d'�poque, on comprend que cette musique est taill�e sur mesure pour ce type d'instruments. L'usage d'instruments de l'�poque correspondant � celle de la musique choisie nous permet de saisir et d'appr�cier toutes les subtilit�s et les ch�toiements de l'�uvre. Plus encore, ils nous donnent l'impression d'entendre l'�uvre telle qu'elle �tait au moment de sa cr�ation. Une musique � l' "�tat naissant", au sens purement (al)chimique du terme�

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Les baroqueux croient aussi que l'interpr�tation musicale doit reposer sur les principes esth�tiques correspondant � une �poque et une r�gion donn�es. Les trait�s en tous genres abondent en ce si�cle d'encyclop�distes, et constituent une mine d'or quant � la facon de jouer d'un bon interpr�te. La musique baroque est extr�mement codifi�e, et tout n'est pas n�cessairement �crit sur papier: comme dans le jazz, il y a une grande part d'improvisation. Cette improvisation n'est pas fantaisie de la part de l'interpr�te: il �tait du devoir de tout musicien accompli d'�tre capable d'ornementer, de broder, d'improviser des cadences. Celui qui ne jouait que les notes �crites passait pour un amateur. L'interpr�te moderne doit donc se r�f�rer aux sources �crites de l'�poque, heureusement fort nombreuses, qui constituent les clefs de vo�te d'une interpr�tation �clair�e. On peut par exemple se r�f�rer au trait� de Mont�clair ou au Dictionnaire de la musique de Jean-Jacques Rousseau pour l'interpr�tation de la musique francaise; � l'incontournable trait� de Johann Joachim Quantz pour le r�pertoire de fl�te; � The Art of Playing the Violin de Francesco Geminiani ou L'�cole de violon de L�opold Mozart pour les instruments � cordes� Les sources sont l�; nous aurions donc tort de ne les pas utiliser.

Il existe � l'�poque baroque, comme � n'importe quelle �poque, de grandes correspondances entre les arts: aussi, il est bon de conna�tre l'extravagance et la rutilance des �glise baroque italiennes pour jouer du Vivaldi, et l'extr�me raffinement de Versailles pour jouer Lully et Couperin. M�s par leur d�sir d'authenticit� et de rectitude historique, les baroqueux se donnent la peine de vouloir comprendre la rh�torique et les pas de danse baroque pour mieux jouer une suite fran�aise, ou de noter le tempo d'une bo�te � musique viennoise pour donner le tempo juste aux danses allemandes de Mozart. Ils vont m�me jusqu'� utiliser le diapason de l'�poque, le plus souvent le la=415 Hertz (soit 1/2 ton en-dessous du la moderne) et � accorder leurs instruments de fa�on "temp�r�e", c'est-�-dire de sorte que l'espace entre les notes soit diff�rent d'une note � l'autre: par exemple dans un certain temp�rament (une douzaine environ sont utilis�s de nos jours), un fa di�se est plus haut qu'un sol b�mol, car le fa di�se 'tend' vers le sol, alors que le sol b�mol s'en �loigne. Ainsi, les quintes sont plus pures, et si un accord mineur s'av�re d'une couleur plus sombre, un accord majeur, du fait que la tierce en soit hauss�e, poss�de une sonorit� beaucoup plus lumineuse. Il est int�ressant de noter que toutes les notes n'�tant pas �gales, les s�quences, si courantes dans la musique de l'�poque, sonnent de facon diff�rente � chaque fois� un d�tail peut-�tre, mais qui change grandement la couleur de la musique. Car en baroque, tout est une histoire de couleur�

On commence maintenant � appliquer les principes d'exactitude historique � d'autres �poques: jouer Beethoven sur pianoforte, Bruckner avec violons romantiques avec cordes de boyau, Haydn et Mozart au la=430 Hertz - ce qui change grandement la couleur et le caract�re! - , jouer Debussy sur un Pleyel nous aide � comprendre chacune de ces musiques, et nous indique que s'il est 'permis' de la jouer sur instruments modernes, elle a quand m�me �t� �crite sur mesure pour les instruments de son �poque.

Enfin, les baroqueux veulent comprendre ce qu'ils jouent, afin de red�couvrir et de mettre en valeur les joyaux de cette �poque de grands esprits qui fut le berceau de la modernit�. Bref, nous croyons que la musique de l'�poque des Lumi�res est la musique la plus fantastique jamais compos�e, la plus exub�rante, la plus extr�me, la plus passionn�e, bref: la plus excitante!

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